Remontons le temps. Nous sommes le samedi 29 mars 2008. Le Futuroscope inaugure en grande pompe sa nouvelle attraction révolutionnaire : Les Animaux du Futur, une exclusivité mondiale associant la technologie de la réalité augmentée à un scénario possible d’évolution des espèces.
L’attraction des Animaux du Futur prend place dans un nouveau pavillon créé par Denis Laming, l’architecte historique du Futuroscope. Ce pavillon est une évolution plus organique d’une architecture jusqu’alors plutôt minérale. Il est un clin d’œil au réel et au virtuel, mais s’apparente aussi à une ADN architecturée. Il se présente comme une arche de Noé du futur. Sa forme fluide, ses courbes en ellipse dessinent un ovale géométrique et élancé.
Après avoir franchi l’entrée du pavillon, ornée d’une fresque évoquant le thème de l’évolution, les visiteurs du Futuroscope pénètrent dans un espace introductif au voyage. Par écran interposé, Jamy Gourmaud, le célèbre animateur de l’émission C’est pas sorcier sur France 3, dialogue avec le pod, une créature futuriste sympathique, et plante le décor. Après avoir commenté le mécanisme de l’évolution et les modifications possibles de notre planète dans le futur lointain, l’animateur décrit les animaux étranges que découvrent peu à peu les visiteurs : le fou-baleine, immense oiseau marin de 3 mètres d’envergure, le cuirasson, étonnant rongeur à carapace, les flotteurs des récifs, descendants de la limace de mer et les cochonnets des monts, petits animaux à fourrure épaisse. Les présentations faites, il est temps pour les visiteurs de s’équiper et de procéder à l’embarquement.
A bord de véhicules d’expédition, les visiteurs-explorateurs sillonnent des décors réels reconstituant les habitats de notre planète tels qu’ils pourraient évoluer dans le futur, sous l’effet des changements climatiques et de l’activité de l’écorce terrestre. Au cœur d’une steppe aride et froide, d’une vallée marécageuse, des fonds marins de l’océan global ou de la jungle tropicale, les visiteurs, équipés de jumelles de réalité augmentée et d’un bracelet-capteur, voient surgir virtuellement et en 3D les animaux qui pourraient peupler notre planète dans 5, 100 et même 200 millions d’années. Au fil de quatre espaces différents, les animaux s’animent et réagissent aux stimulations des visiteurs. Réel et virtuel se superposent jusqu’à gommer la frontière qui les sépare.
Tout au long de l’expérience, Jamy Gourmaud accompagne les visiteurs dans chaque étape du safari. Il commente les scènes dans lesquelles ils sont immergés et leur indique comment interagir avec les animaux. La position exacte de chaque visiteur est calculée par le système de localisation intégré au véhicule. C’est pourquoi chaque visiteur dispose d’un champ de vision propre et agit sur son environnement de façon autonome. Acteur de son aventure, chaque visiteur, via son bracelet-capteur, interagit, communique et joue avec les nombreuses créatures qui viennent à sa rencontre. Chacun vit ainsi sa propre expérience d’immersion et de contact avec les animaux virtuels.
+ 5 MILLIONS D’ANNÉES : le décor reconstitue une savane aride et froide, composée de dolomites. De terribles caracoureurs et de petits cuirassons viennent frôler les visiteurs. Jumelles sur le nez, les visiteurs sont tout juste surpris par le fruit qui vient d’apparaître dans leur main quand plusieurs baboukaris s’approchent d’eux pour qu’ils les nourrissent. Pour rassasier ces singes doués d’une intelligence supérieure à celle des chimpanzés d’aujourd’hui, il faut se saisir des fruits dont ils raffolent et leur tendre la main.
+ 100 MILLIONS D’ANNÉES : les visiteurs pénètrent dans une grotte au fond marécageux ouverte sur un paysage de montagne. Un gigantesque bébé tortunosaure cherche à apprivoiser les visiteurs en osant passer la tête dans la grotte pour les surprendre. Plus étonnant encore, cet œuf qui a pris place, comme par magie, au creux de la main des visiteurs. Tout à leur étonnement, ils vont le voir éclore sous leurs yeux, libérant un oiseau crache-feu. Au loin, un grand planeur bleu effectue un vol majestueux au-dessus de leur tête.
+ 200 MILLIONS D’ANNÉES : direction les fonds marins de l’océan global. Seule une torche permet aux visiteurs de percer l’obscurité des profondeurs peuplées de requins-lumière et de calmars arc-en-ciel, et d’en explorer les mystères. C’est en balayant les fonds marins de leurs mains tendues que les visiteurs éclairent peu à peu ces étranges habitants. Captivés par la lumière émise, les argentides se regroupent autour de leurs mains pour composer un ballet aquatique inédit.
+ 200 MILLIONS D’ANNÉES : les visiteurs sont immergés dans une jungle tropicale à la végétation exubérante. Le suceur-sauteur, descendant de l’escargot actuel, bondit dans la main des visiteurs et, trouvant sûrement leur compagnie agréable, semble ne pas vouloir en partir. C’est d’ailleurs cette petite créature qui avait ma préférence, comme beaucoup de passionnés de parcs qui ont connu cette attraction. La pieuvre-singe, créature géante et agile, manifeste sa joie d’accueillir les visiteurs en descendant de la cime des arbres pour leur offrir des fruits exotiques en signe de bienvenue. Mais une créature gourmande, l’oisson des forêts, vient immédiatement les leur voler.
Pour donner vie à cette expérience, le Futuroscope s’est associé à Total Immersion, une société française spécialisée dans le domaine de la réalité augmentée, qui avait le vent en poupe à cette époque ! En son temps, la force de Total Immersion est d’avoir su exploiter simultanément et de manière optimale les capacités des trois composants essentiels d’un ordinateur : le microprocesseur, la carte graphique et son propre microprocesseur, et la partie vouée à l’acquisition d’images vidéo. C’est le sens de son logiciel baptisé D’Fusion (pour Digital Fusion). Celui-ci permet d’intégrer en temps réel, dans un flux vidéo, des images de synthèse en 3D interactives parfaitement réalistes.
A la fin du safari, une salle de post-show de 200 m² attend les explorateurs, conçue sous la direction scientifique de Christiane Denys, professeur de zoologie au Muséum national d’Histoire naturelle, dans lequel les animaux du futur côtoient ceux d’aujourd’hui et d’hier. Animé par Jamy Gourmaud, ce parcours apporte un nouvel éclairage sur l’évolution des espèces et les liens entre passé et futur. Dans cette salle ovoïde, les visiteurs comprennent l’évolution de la Terre des origines à aujourd’hui en observant une sphère géante représentant, par projection interne, l’évolution des plaques terrestres. L’intérêt de cet objet est de démontrer que les hypothèses quant aux évolutions futures sortent en droite ligne des événements passés. Un deuxième espace retrace pourquoi certaines espèces traversent le temps sans que leur morphologie ne s’en ressente. On les appelle des « fossiles vivants ». Par comparaison avec les empreintes et les fossiles de leurs lointains ancêtres, les visiteurs découvrent comment ces animaux ont évolué jusqu’à aujourd’hui. Derrière un écran de brouillard simulant la frontière avec le monde futur, les visiteurs pénètrent dans une galerie et découvrent, dressés au fond d’une fosse, deux animatronics atteignant deux et quatre mètres de haut. A leurs côtés, campent des animaux paléontologiques issus du Muséum national d’Histoire naturelle. L’animatronic du caracoureur côtoie le squelette du smilodon ou tigre à dents de sabre, celui du bébé tortunosaure le squelette d’un petit archéoptéryx. A quelques mètres de là, comme un pied de nez à ce fabuleux voyage parmi les créatures du futur, Jamy Gourmaud interpelle les visiteurs sur l’avenir d’une autre espèce : l’être humain ! A travers un film pédagogique d’environ 5 minutes, l’animateur mêle humour et science avec brio et s’interroge : l’être humain pourrait-il encore être présent dans plusieurs millions d’années ? Comment aurait-il évolué ? A quoi ressemblerait-il ? Un peu plus loin, les visiteurs glissent la main dans un anneau pour manipuler et déplacer l’impressionnant oisson des mers, modélisé en 3D, qui surgit de l’écran situé face à eux. Puis vient l’heure d’une dernière expérience : marcher sur l’eau ! Un tapis virtuel, représentant une surface d’eau mouvante, est disposé sur le passage des visiteurs. En marchant dessus, ils s’amusent à faire fuir les argentides qui frétillent sous leurs pas.
Trop en avance sur son temps, souvent incomprise des visiteurs, l’attraction des Animaux du Futur n’a pas rencontré le succès escompté. Mais elle était tout de même l’attraction préférée des enfants. Dès le 4 avril 2009, une « version 2 » est proposée. De nouveaux animaux sont ajoutés au parcours : le dragon de salant, le cochonnet des monts, les araignées argentées et le scarabée crache-feu. De plus, le rendu 3D a été amélioré, une tablette a été ajoutée dans les véhicules pour augmenter les séquences d’immersion, le scénario a été dynamisé et le préshow a été revu pour devenir une sorte de briefing pour les visiteurs. Malgré tout, l’attraction fermera définitivement ses portes le dimanche 30 septembre 2012, dans la quasi indifférence générale. Elle est remplacée par La Machine à Voyager dans le Temps (basée sur la licence à succès des Lapins Crétins) depuis le 7 décembre 2013. Si le système de transport et le tracé du parcours restent les mêmes, la technologie utilisée est beaucoup moins novatrice, car il s’agit d’une projection 3D-Relief classique.